Nouvelle étude sur les produits laitiers et le cancer de la prostate : une analyse critique

À première vue, l’étude montre une association entre la consommation de produits laitiers et le risque de cancer de la prostate chez les participants. Toutefois, une analyse plus approfondie révèle certaines limites importantes quant à l’interprétation potentielle de ces conclusions.

Plus particulièrement, l’étude d’Orlich et ses collaborateurs¹ a suivi pendant 7,8 ans en moyenne un groupe très particulier : 28 737 hommes adventistes du septième jour vivant aux États-Unis et au Canada. Or, cette population est connue pour ses habitudes alimentaires particulières, lesquelles pourraient ne pas avoir été bien prises en compte dans une étude de cette nature, en plus de ne pas refléter celles de la population générale. Par conséquent, les résultats pourraient ne pas être applicables à la population générale.

Voici d’autres détails et limites de l’étude :

• Il s’agit d’une étude d’observation. Ainsi, elle ne peut pas montrer de relation de cause à effet, mais seulement des associations, comme le reconnaissent les auteurs; 
• L’alimentation n’a été évaluée qu’une seule fois, au début de l’étude. On ne sait donc pas si des changements qui pourraient avoir une incidence sur les résultats pourraient s’être produits au cours de la période de suivi d’approximativement 8 ans. Cette limite est également reconnue par les auteurs; 
• L’association observée est principalement liée au lait à teneur réduite en matières grasses. En effet, le yogourt, le fromage et le lait à pleine teneur en matières grasses n’étaient pas associés à un risque accru; 
• D’autres facteurs (inconnus des chercheurs ou non mesurés) pourraient avoir influencé les conclusions.
  • Les auteurs notent eux-mêmes que dans cette étude, les personnes qui consommaient le plus de produits laitiers étaient également celles qui consommaient le moins de produits à base de légumes. Bien que les auteurs aient tenu compte de la consommation de noix, de graines et de légumineuses, ils n’ont pas considéré la consommation de fruits et de légumes dans leur analyse, ce qui pourrait être important, car certaines études ont démontré que la consommation de fruits et légumes est associée à un risque réduit de cancer de la prostate^2,3.
  • D’autres aliments inconnus consommés avec le lait, par exemple des desserts riches en sucre, pourraient être responsables de l’association. Par conséquent, les produits laitiers pourraient seulement être « coupables par association ». 

L’ensemble des données, telles qu’évaluées par plusieurs des plus importantes autorités mondiales en matière de santé (Fonds mondial de recherche contre le cancer⁴ et Centre international de Recherche sur le Cancer de l’OMS⁵), ne permet pas d’établir une association robuste entre la consommation de produits laitiers et le risque accru de cancer de la prostate.