Au Canada, l'utilisation d'hormones de croissance artificielles n'est pas permise dans la production laitière, qu'elle soit traditionnelle ou biologique. Par ailleurs, des mesures strictes et de bonnes pratiques concernant l'utilisation d'antibiotiques et le bien-être animal sont en place pour l'ensemble du lait produit au Canada, y compris celui produit selon les méthodes traditionnelles.
En plus de cette réglementation, la production de lait biologique doit satisfaire aux Normes canadiennes de certification en agriculture biologique1.
EN PRATIQUE
- On a observé que les produits laitiers biologiques contenaient des taux significativement plus élevés d'acides gras oméga-3 et d'acides linoléiques conjugués (ALC), mais l'importance clinique de ces différences demeure incertaine;
- Il n’existe pas de données suggérant que les produits biologiques, y compris le lait, procurent des bienfaits différents pour la santé par rapport aux aliments produits selon les méthodes traditionnelles;
- En plus du mode d'élevage (c.-à-d. biologique vs traditionnel), de nombreux facteurs, entre autres la saison et le régime alimentaire, affectent le contenu nutritionnel du lait et des produits laitiers.
Les facteurs qui affectent la composition nutritionnelle du lait
Le mode d'élevage (c.-à-d. biologique vs traditionnel) est l’un des facteurs qui peuvent modifier le profil nutritionnel du lait.
Par ailleurs, plusieurs autres facteurs pourraient affecter la composition nutritionnelle du lait et des produits laitiers, y compris2,3 :
- La saison;
- L'alimentation des bovins (qui est affecté par la saison et la supplémentation en vitamines et minéraux);
- La variabilité génétique et la race des bovins.
Que dit la recherche au sujet du lait biologique?
À ce jour, plusieurs études suggèrent que le lait biologique pourrait avoir une composition en acide gras plus favorable que celle du lait de vache traditionnel. Les conclusions d’une méta-analyse publiée en 2016 indiquent par exemple que le lait biologique présente des concentrations significativement plus élevées en acide gras oméga-3 et polyinsaturés totaux de même qu’en acides linoléiques conjugués4.
Toutefois, la pertinence de ces conclusions demeure incertaine sur le plan de la nutrition et de la santé :
- Le Guide alimentaire canadien recommande de consommer au moins 2 portions de poisson par semaine, ce qui fournirait environ 0,3 à 0,45 g d’AEP et d’ADH (acides gras oméga-3) par jour5. Selon la méta-analyse, 2 tasses (500 ml) de lait à pleine teneur en matières grasses en procureraient 39 mg s’il était biologique, et 25 mg s’il était traditionnel4. Or, ces valeurs représentent respectivement ~10 % et 6 % de la quantité recommandée, ce qui est une proportion relativement petite.
- Par ailleurs, en valeurs absolues, boire 2 tasses de lait biologique à pleine teneur en gras plutôt que du lait produit selon les méthodes traditionnelles entraînerait une augmentation de 14 mg de l’apport en acides gras oméga-34. Cependant, il est peu probable que cette augmentation soit cliniquement significative lorsque l’alimentation est considérée dans son ensemble.
- De plus, les résultats pourraient ne pas refléter le contexte canadien. En effet, parmi les 170 études incluses dans la méta-analyse, seulement 7 utilisaient des données canadiennes. La majorité (76 %) des études avaient été menées en Europe4.
Il a été démontré que la grande consommation de fourrage frais par les bovins qui broutent avait un effet désirable sur le contenu en acides gras du lait4. En fait, on a également observé que les vaches des fermes biologiques recevaient davantage de fourrage frais, ce qui pourrait expliquer pourquoi le lait biologique présente un profil nutritionnel plus favorable en acides gras. Une méta-analyse de 2012 suggère qu’une plus grande consommation de fourrage frais par les bovins dans les fermes traditionnelles entraîne également une augmentation de la qualité nutritionnelle du lait produit3. Une autre revue suggère, quant à elle, que la concentration en plusieurs nutriments dans le lait, y compris le ratio acides gras oméga-3:oméga-6, peut être manipulée au moyen des régimes alimentaires6.
- La plupart des études comprises dans ces analyses ont évalué du lait cru plutôt que du lait pasteurisé; par conséquent, une certaine prudence s’impose dans l'interprétation des résultats.
- De plus, plusieurs études ont révélé que la saison de production du lait pourrait affecter le contenu en acides gras, au même titre que le mode d'élevage7.
En outre, une revue systématique a comparé les effets sur la santé des aliments biologiques et des aliments traditionnels7. Les auteurs ont conclu que la littérature publiée ne contient pas de données de qualité selon lesquelles les aliments biologiques sont significativement plus nutritifs que les aliments traditionnels.
Conclusion
Des données scientifiques en émergence suggèrent que les produits laitiers biologiques contiennent une quantité plus importante de certains nutriments, par exemple les acides gras oméga-3 et les ALC. Toutefois, il n'est pas possible d'établir avec certitude si ces différences dans la composition nutritionnelle sont associées à des bienfaits importants pour la santé.
Des études subséquentes, entre autres des études randomisées et des études de cohorte de longue durée, devraient examiner la pertinence clinique des différents taux de nutriments contenus dans les produits laitiers biologiques vs traditionnels. Ces études devraient également tenir compte des variations dans la composition du lait dues à la saisonnalité et aux régimes alimentaires des bovins.
Par ailleurs, la recherche axée sur les produits laitiers canadiens est essentielle afin de déterminer si ces différences sont applicables au lait produit au Canada.
Références
- Agriculture et Agroalimentaire Canada. 2012. Industrie du lait biologique au Canada – Édition 2012. www.dairyinfo.gc.ca. Consulté le 1er avril 2016.
- Forman J et coll. Organic foods: health and environmental advantages and disadvantages. Pediatrics 2012;130:e1406-1415.
- Palupi E et coll. Comparison of nutritional quality between conventional and organic dairy products: a meta-analysis. J Sci Food Agric 2012;92:2774-2781.
- Średnicka-Tober D et coll. Higher PUFA and n-3 PUFA, conjugated linoleic acid, α-tocopherol and iron, but lower iodine and selenium concentrations in organic milk: a systematic literature review and meta- and redundancy analyses. Br J Nutr 2016;115:1043-1060.
- Les diététistes du Canada. 2013. Sources alimentaires d’acides gras oméga-3. www.dietitians.ca. Consulté le 13 avril 2016.
- Haug A et coll. Bovine milk in human nutrition – a review. Lipids Health Dis 2007;6:25.
- Smith-Spangler C et coll. Are organic foods safer or healthier than conventional alternatives?: a systematic review. Ann Intern Med 2012;157:348-366.